Depuis 2003 et jusqu’en 2013, La Maison du Conte c’est associée à la Maison d’arrêt de Fresnes pour concevoir et mettre en œuvre des projets autour du conte et de l’oralité destinés aux détenus hommes et femmes. Basés sur des rencontres, des ateliers et des racontées, les interventions ont été portées par différents conteurs tels que Pépito Matéo, Jacques Combe, Marien Tillet, Christèle Pimenta, Julien Tauber, Valérie Briffod… ; chacun y puisant une énergie et un élan bien particulier pour construire son parcours et se remettre en question face à l’autre.

Le 20 mai 2010, Jacques Combe revenait à la Maison d’arrêt pour présenter Vétéran(s) aux détenus du Centre National d’Évaluation, lieu de passage obligé des “longues peines” en France. Pendant un an, le conteur a présenté son spectacle aux différents groupes de détenus, puis animé une série d’ateliers pour rencontrer, échanger, croiser les paroles et les regards.

 

« Quel est ce grain de sable qui a fait un jour pencher la balance de la justice, et qui fait qu’aujourd’hui ils sont “dedans” et nous “dehors” ? Finalement c’est souvent l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarette qui nous sépare, eux et nous…

À chaque fois, raconter en prison c’est comme une “échappée belle” que nous faisons ensemble eux et moi. Et on ne peut rester indemne de cet échange-là… ni eux, ni moi.

Ces moments-là sont pour eux comme “des fenêtres aux barreaux”, une fenêtre ouverte sur un espace imaginaire qui nous est commun. Voilà notre vraie richesse à tous, celle qui nous relie les uns aux autres !

Cela rend possible, à l’intérieur même de la prison, d’oublier avec eux les murs qui nous entourent, pendant le temps que dure l’atelier conte.

Ces rencontres sont pétries de leur humour, d’un certain recul sur la vie carcérale et de la vie tout court. Elles sont remplies aussi de leur pudeur ainsi que de leur tendresse qui souvent viennent montrer le bout de leur nez. En retour, j’y mets toute ma bienveillance, mon écoute, mes histoires et mon amour du genre humain. Je tente à chaque fois d’offrir ce qui constitue le meilleur de moi-même.

Eux aussi, certainement. Car sans oublier tout à fait les raisons probables qui les ont amenés à écoper de longues peines (15 ans au moins), j’ai toujours en face de moi des hommes qui m’offrent la meilleure part d’eux-mêmes.

Des instants d’humanité, comme des respirations au milieu d’un monde clos. »

Jacques Combe